JACQUELINE RAMSEYER
artiste peintre

Pyramide 3, 1989, 45 x 48,5 cm
oeuvre

En tant que peintre, Jacqueline Ramseyer s’est révélée au public en 1977, avec des collages exposés à la Galerie Numaga II d’Auvernier. Elle privilégie les techniques mixtes, partant des matériaux pour élaborer au fur et à mesure son œuvre: papiers déchirés, collage, assemblage, peinture (à l’acrylique, à la gouache ou à l’aquarelle). Cependant, peu à peu, la peinture – toujours sur papier collé sur toile ou marouflé sur bois – va prendre la première place. Jacqueline Ramseyer a fait réaliser aussi quelques tapisseries par une licière de Provence, Laure Grimal, dont deux modèles se trouvent exposés au temple de Serrières. On lui doit également des dessins, des éléments en trois dimensions, ainsi que quelques bois peints, taillés comme des totems et rehaussés de couleurs.

Jacqueline Ramseyer veut traduire des sensations, des visions, à travers des trames rythmées, une texture subtile de la couleur. Elle s’est sentie à l’aise autant dans le petit que dans le grand format. Elle aimait manier aussi bien les couleurs fortes (le rouge, le bleu principalement) que les tons diffus, délicats, précieux, avec une prédilection pour l’or et l’argent byzantins dans certaines de ses œuvres qui se rapprochent des enluminures.

Sous quelque forme que ce soit, les créations de Jacqueline Ramseyer visent à refléter une forme d’apaisement, de joie, de confiance en la vie. Le carré est presque toujours présent dans ses œuvres parce que symbole de la Terre nourricière, de cohésion, d’équilibre des tensions, de sérénité. Le triangle – chemin d’élévation – et la croix – centre des énergies – au même titre que l’étoile se retrouvent aussi dans nombre de peintures.

Jean-Pierre Jelmini a dit ceci, à l’occasion du vernissage d’une exposition à Yverdon-les-Bains, le 25 avril 1992:

« Dans les peintures de Jacqueline Ramseyer, j’ai retrouvé la douce violence et la lancinante litanie des livres d’oraisons; j’ai aimé la patience tenace de ces signes minuscules dont la multiplication et la répétition semblent quêter une impression d’infini, comme le font les moulins à prières et les oriflammes incantatoires des moines du Tibet; j’ai plongé dans ces carrés et ces losanges en abîme qui cherchent au fond d’eux-mêmes la perception de l’éternité sans cesse recommencée; j’ai tremblé devant l’audace apparente de ces pyramides de certitude, si largement et solidement posées sur leur base et pourtant si fragilement évanescentes lorsqu’on les escalade du regard jusqu’au moment où, parvenues à leur sommet, elles doivent bien renoncer à être, faute de pouvoir accéder à l’inaccessible. J’ai voulu en vain décrypter les messages hâtivement griffonnés, comme des sourates, sous la dictée de l’inconscient puis encadrés de couleurs pour être pendus aux murs du temple comme un rappel sans acrimonie de l’humaine condition. J’ai goûté l’insistant et irréversible martèlement de l’étampage qui trace, sur le papier, le long et lent cheminement de l’homme vers l’absolu ou vers lui-même, sans qu’il sache jamais vraiment l’option qu’il doit prendre. »

Jacqueline Ramseyer a aussi beaucoup travaillé à partir d’écritures, utilisant parfois comme base de vieux textes manuscrits, ou encore d’anciennes partitions musicales. Une de ses œuvres a d’ailleurs illustré durant plusieurs années et jusqu’en 2006 le programme annuel de l’Orchestre symphonique neuchâtelois.

Très ouverte à différentes expérimentations, Jacqueline Ramseyer a su parfois collaborer avec d’autres artistes: avec Claire Pagni et Armande Oswald, par exemple, en 1983, pour une composition intitulée Vestiaire du silence. Elle renouvelle l’expérience en 2005-2006, avec André Ramseyer, en travaillant graphiquement sur la base de fragments de poèmes écrits par son époux. Vestiaire du silence sera très bien accueilli par le public et la critique; il vaudra à ses trois auteures un prix de la Commission cantonale des Beaux-arts.

Mots-clés

J’ai envie de faire parler la matière. J’ai besoin de la matière, de la toucher, de la sentir.
La forme carrée exalte la notion de cohésion, d’équilibre parfait, d’unité.
Par le carré et la pyramide, recherche d’une géométrie sensible et vibratoire.

Texte écrit le 12 septembre 1991 pour l’exposition triennale SPSAS au Musée d’art et d’histoire de Neuchâtel, où l’artiste a travaillé sur le thème des cartes à jouer:

Ai-je réussi à « jouer aux cartes » sans règles du jeu? L’essai d’acrostiche qui suit m’a obligée à trouver des mots qui, très malicieusement, m’ont forcée à prendre la symbolique du jeu très au sérieux:

Valeur Détente Règle
Attente Audace Ordre
Liberté Mesure Ivresse
Etrange Emotion Signe
Temps Sortilège
Songe

Jacqueline Ramseyer aimait à citer cette phrase inspirée de Jean Arp:
« Nous ne voulons pas copier la nature. Nous ne voulons pas reproduire, nous voulons produire comme une plante qui produit un fruit. Nous voulons produire directement et non par truchement. »


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